
Le Législateur et la doctrine administrative imposent aux Agents de l’Administration fiscale de motiver leurs rappels d’impôts dans les propositions de rectifications, quelle que soit la nature des redressements concernés. Ce principe intangible a été confirmé par le Conseil d’Etat dans une situation bien précise. A partir de cet exemple, Avocats Picovschi estime opportun d’en profiter pour effectuer un rappel de la stratégie à adopter si vous vous retrouvez confronté (e) à une telle problématique.
Origine du litige
En application des dispositions de l’article 158. 7-1° du Code général des impôts (CGI), les revenus des contribuables exerçant une activité professionnelle non salariée, soumis à un régime réel d'imposition dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices agricoles (BA) et des bénéfices non commerciaux (BNC), non adhérents d'un organisme agréé (OA.) ou ne faisant pas appel aux services d'un professionnel de l'expertise comptable conventionné, supportent une majoration de 25 % sur le montant de leurs bénéfices pour le calcul de l’impôt sur le revenu correspondant.
M. X, non adhérent d’un OA., s’est vu notifier des rappels d’impôt sur le revenu sans que le représentant du fisc ne l’ait informé de l’application de la majoration précitée sur ses nouveaux bénéfices après contrôle.
Cependant, malgré sa contestation en première instance portant sur le défaut de motivation de cette majoration de 25 %, l’Administration fiscale a tenté de « couvrir » le manquement commis par l’inspecteur au stade de la proposition de rectification.
A la suite d’une longue bataille via le Tribunal administratif et la Cour administrative d’Appel de Marseille, son Avocat a obtenu gain de cause.
C’est ainsi que dans son Arrêt du 26 juillet 2018 (n° 408480, 9ème et 10ème chambres réunies), le Conseil d’Etat a donné raison à M. X en considérant que l’esprit même des dispositions de l’article L. 57. du Livre des procédures fiscales (LPF) n’avait pas été respecté. Plus précisément, les juges ont estimé que cette majoration de 25 % constituait une disposition d’assiette qui, en tant que telle, doit apparaître distinctement dans la proposition de rectification.
En d’autres termes, M. X a été dégrevé du montant des rappels d’impôt sur le revenu avec les pénalités y afférentes, résultant de l’application du coefficient multiplicateur de 1,25, non motivée expressément pour chacun des exercices visés par le contrôle.
Cet Arrêt permet donc de rappeler qu’en cas de redressements des résultats bénéficiaires, consécutivement à une vérification de comptabilité ou à un examen de comptabilité ou simplement suite à un « contrôle sur pièces », les Agents des Finances publiques ont l’obligation de justifier cette majoration de 25 % applicable aux non adhérents d’un OA.
Et si cela vous arrive ?
Si vous vous retrouvez dans la situation de M. X, à savoir que vous recevez une proposition de rectification avec un rehaussement de votre bénéfice sans que ne soit motivée l’application du coefficient multiplicateur de 1,25 prévu par l’article 158. 7-1° du (CGI), il convient de jouer finement.
En effet, si vous vous hâtez dans votre réponse à partir « flamberge au vent » en soulevant le vice de procédure commis par l’inspecteur, celui-ci va s’empresser de renotifier dans les règles de l’art, en faisant référence scrupuleusement aux dispositions précitées, surtout si l’exercice incriminé est prescrit fiscalement au 31 décembre de l’année en cours.
Concrètement, si en 2020 le défaut de motivation de la majoration de 25 % porte sur l’année 2017, pas de précipitation avant le 31 décembre de cette année ! Toutefois, en application de l’ordonnance du 25 mars 2020 suite à l’épidémie de Covid-19, la suspension des délais en matière fiscale va se traduire par le report de la prescription de l’année 2017. L’administration fiscale aura donc la faculté de « redresser » au titre de ladite année les entreprises et les particuliers jusqu’à début avril 2021.
Par conséquent, la « tactique » préconisée par rapport à la date du 31 décembre 2020 doit être adaptée en fonction de ces circonstances tout à fait exceptionnelles.
Soulevez le cas échéant un autre point de la proposition de rectification (voire rien du tout si en votre âme et conscience, il n’y a pas matière à contestation sur le rehaussement proprement dit de votre bénéfice), mais pas encore le manquement en cause.
Et attendez patiemment le début de l’année 2021 pour déposer la réclamation contentieuse adéquate, en contestant formellement la partie du rappel d’impôt sur le revenu avec les pénalités y afférentes, relative à l’application du coefficient multiplicateur de 1,25. Toutefois, en application de l’ordonnance du 25 mars 2020 suite à l’épidémie de Covid-19, la suspension des délais en matière fiscale va se traduire par le report de la prescription de l’année 2017. L’administration fiscale aura donc la faculté de « redresser » au titre de ladite année les entreprises et les particuliers jusqu’à début avril 2021.
Par conséquent, la « tactique » préconisée par rapport à la date du 31 décembre 2020 doit être adaptée en fonction de ces circonstances tout à fait exceptionnelles.
Bien entendu, cette stratégie qui consiste à ne pas se dévoiler trop tôt emporte souvent ses effets pour toutes les autres sortes de vices de procédure constatés dans une proposition de rectification.
Cependant, tout cela relève de subtilités jamais évidentes à dominer pour les contribuables non avertis. Sans sous-estimer le niveau de connaissances et d’intelligence du dirigeant d’entreprise ou du simple particulier, confronté aux conséquences d’une vérification fiscale, n’hésitons pas à affirmer … « à chacun son métier ».
En clair et plus généralement, pour toutes problématiques susceptibles de survenir pendant et après un contrôle fiscal, comptez sur l’expérience en Droit fiscal d’Avocats Picovschi, implanté à Paris depuis plus de 30 ans, pour assurer habilement la meilleure défense possible de vos intérêts.