Abus de droit fiscal : l'administration a parfois tort

Abus de droit fiscal : l'administration a parfois tort
Vous voulez plus d’informations ?
Contactez nous au +33(0)1 56 79 11 00

Nos attachés d'information sont à votre écoute et vous expliqueront notre fonctionnement.

Rencontrons-nous !

Nous sommes présents au 90 avenue Niel,
62 & 69 rue Ampère, 75017 Paris.

Jean Martin
Jean Martin
Ancien Inspecteur des Impôts

Nous bénéficions de l'expertise de notre of counsel, Jean Martin, ancien Inspecteur des Impôts.

| Publié le

Dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 64 du Livre des procédures fiscales, les litiges survenant entre les contribuables et les Services des Impôts sont susceptibles d'être soumis, à la demande de l'une ou l'autre des parties, à l'avis du Comité de l'abus de droit fiscal. Ce n'est évidemment pas un scoop d'affirmer que les appréciations émises par cet Organisme versent souvent du côté du "pot de fer".

Par conséquent, quand l'administration est désavouée, les avis favorables à l'entreprise ou au particulier méritent d'être évoqués. Selon le bulletin officiel des Impôts n° 8 du 30 Janvier 2012 (série 13 L-1-12) publié par la Direction générale des Finances publiques, le fisc n'a pas obtenu gain de cause dans trois affaires intéressantes dont deux sont très similaires.

1. Si on évoquait le régime fiscal des sociétés mères …

La société X a acquis le 11 décembre 2006, la totalité des titres de la société S pour un prix de 6 737 500 €. La société S n'avait plus d'activité opérationnelle et son actif n'était composé que de liquidités.

La société X, qui a entendu se prévaloir du régime des sociétés mères prévu aux articles 145, 146 et 216 du Code général des impôts, a pris l'engagement formel de conserver les titres acquis pendant une durée minimale de deux ans, conformément aux dispositions de l'article 54 de l'annexe II audit Code.

Le 7 juillet 2007, la société X a reçu une distribution de la société S d'un montant de 6 833 560 €. Cette distribution, placée sous le régime des sociétés mères, a été retranchée du résultat fiscal de la société X au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007, après déduction de la quote-part de frais et charges de 5%.

Le 16 décembre 2007, la société S a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine au profit de la société X avec effet rétroactif au 1er janvier 2007. Cette absorption, placée sous le régime fiscal de faveur des fusions, a dégagé un mali de confusion de 6 632 666 € qui est à l'origine d'un déficit fiscal de 6 157 650 € au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007.

L'administration a relevé qu'à la date d'acquisition des titres, la société S ne détenait plus aucun actif corporel ou incorporel et n'exerçait plus d'activité économique mais disposait de liquidités importantes nées de la cession antérieure de ses actifs. Elle a estimé que sous le couvert d'une acquisition de titres et de distributions de dividendes, la société X avait en fait réalisé une opération qui, dans son ensemble, dissimulait une réalité économique et financière différente et dont l'objectif était exclusivement fiscal, dès lors qu'il était manifeste qu'elle n'avait jamais eu l'intention d'animer la société S, pas plus qu'elle n'avait eu l'intention de valoriser sa participation (l'absorption de cette société ayant dégagé une moins-value compte tenu de la distribution de dividendes dont l'incidence fiscale a été neutralisée grâce au régime des sociétés mères).

Le fisc en a déduit que l'opération appréciée dans sa globalité n'avait pu être inspirée par aucun autre motif que celui de minorer le résultat de la société X et par suite, d'éluder l'impôt correspondant.

L'administration a refusé l'application du régime des sociétés mères et filiales. Elle a réintégré au résultat de l'exercice clos en 2007 la somme de 6 491 882 € (soit 95% de 6 833 560 €) afférente aux dividendes, selon elle, abusivement déduits de ce résultat.

Après avoir entendu ensemble le dirigeant de la société et le représentant du fisc, le Comité a d'abord effectué un historique des faits :

"Les éléments versés au dossier font apparaître que :

  • le 16 décembre 2007, la société S a fait l'objet d'une transmission universelle de patrimoine au profit de la société X avec effet rétroactif au 1er janvier 2007 ;
  • la société confondante, X, est substituée à la société confondue, S, au titre des liquidités apportées à la date d'effet rétroactif, soit le 1er janvier 2007 ;
  • la transmission du patrimoine de la société confondue s'effectue au plan fiscal pour sa valeur à cette même date d'effet rétroactif ;
  • l'annulation de la participation de la société confondante, X, dans la société absorbée, S,   est réputée intervenir, pour la détermination des résultats imposables de l'exercice clos en   2007, à la date d'effet rétroactif.

Par suite, le Comité a déduit de l'ensemble de ces éléments que la distribution litigieuse, réalisée le 7 juillet 2007 par la société absorbée, S, au profit de la société absorbante, X, est intervenue pendant la période intercalaire, et ne pouvait ainsi être prise en compte pour la détermination du résultat fiscal de la société absorbante au titre de 2007 (les titres de la société S étant présumés, au plan fiscal, sortis de l'actif de la société X au 1er janvier 2007)."

En conséquence, compte tenu de la rétroactivité attachée aux effets fiscaux de la confusion de patrimoine, le Comité a émis l'avis que l'administration n'était pas fondée à mettre en oeuvre la procédure de l'abus de droit fiscal pour réintégrer la somme litigieuse au résultat de la société.

2. Où le fisc "fantasme" sur de soi-disant donations déguisées …

La première affaire

Par acte du 2 novembre 2004, M. P a cédé à son neveu, M. H, la nue propriété d'un immeuble lui appartenant sis à Z. Le prix exprimé dans l'acte pour la nue propriété (91 500 €) a été immédiatement et intégralement converti en une rente viagère mensuelle de 475 € par mois.

Considérant que cette vente constituait en réalité une donation, l'administration a notifié le 26 novembre 2010 à M. H un redressement liquidant les droits de mutation au tarif applicable aux donations entre vifs.

Après avoir entendu ensemble le conseil de M. H et les représentants du fisc, "le Comité a relevé que M. P était âgé de 57 ans au moment de la vente, et que si l'administration a soutenu qu'il avait été longuement hospitalisé dans les mois ayant précédé son décès, la durée exacte de cette hospitalisation a été contestée sans que l'administration puisse produire un élément de preuve à l'appui de ses dires fixant à 43 jours consécutifs la durée de cette hospitalisation.

Il a estimé ainsi que la preuve de l'absence d'aléa du contrat de rente viagère n'avait pas été apportée et a considéré, en l'état des informations portées à sa connaissance, que la circonstance que M. P ait donné en deux chèques, remis en juillet et novembre 2004, l'équivalent de plus de 36 mois de service de la rente à son neveu, n'établit pas, compte tenu des éléments soumis à son appréciation, son intention libérale s'agissant de la cession de sa maison."

Par conséquent, le Comité en a conclu que l'administration n'était pas fondée à mettre en oeuvre la procédure de l'abus de droit fiscal.

La seconde affaire du même genre

Par acte du 29 juin 2007, Mme B a cédé ses 1 657 actions de la SA S à sa mère, Mme Y, pour le prix de 1 €.

Considérant cette cession comme consentie à vil prix, l'administration a estimé qu'elle dissimulait en réalité une donation. En conséquence, elle a notifié le 25 octobre 2010 à Mme Y un redressement rétablissant d'une part, la valeur vénale réelle des titres cédés, et liquidant d'autre part, les droits de mutation au tarif applicable aux donations.

Après avoir entendu ensemble le conseil de Mme Y, Mme B et les représentants du fisc, "le Comité a observé que si l'administration avait établi une évaluation valorisant les titres de la société S à 61 € l'action, elle ne démontrait pas qu'en acceptant de céder ses titres pour un prix global symbolique de 1 €, Mme B avait été animée d'une intention libérale.
Il a relevé en effet que Mme B avait justifié un tel prix par ses craintes liées aux infractions fiscales répétées, commises par la société S et une autre société du groupe familial, infractions sanctionnées par l'administration à l'issue de différentes procédures de vérification (et qu'elle estimait susceptibles de déclencher des poursuites pénales et d'entraîner de graves difficultés pour la société).

Le Comité a noté que l'administration n'apportait aucun élément susceptible d'établir que Mme B ait ainsi manqué de sincérité dans la détermination du prix des titres cédés.

Il a considéré en conséquence que si l'administration était fondée à rechercher la valeur vénale réelle des titres de la société S pour fixer l'assiette des droits de mutation à titre onéreux, elle n'établissait pas en revanche, par les seuls éléments dont elle se prévalait, le caractère de libéralité de cette cession."

Le Comité a conclu au fait que le fisc n'était pas fondé à mettre en oeuvre la procédure de l'abus de droit fiscal.

Voici des exemples qui illustrent si besoin est, que le "pot de terre" convaincu de tricheries à l'issue d'un contrôle fiscal, consécutivement à l'application de bonne foi d'une disposition fiscale, a la faculté parfois de se faire entendre … à condition de persévérer.

Sauf s'il a la chance inestimable de dominer parfaitement certaines subtilités juridiques incluses dans tel ou tel article du Code général des impôts et du Livre des procédures fiscales, le particulier ou le responsable d'entreprise a évidemment tout intérêt, pour "combattre la preuve contraire", de demander l'assistance d'un Avocat fiscaliste particulièrement compétent et expérimenté.

Votre avis nous intéresse

* Ces champs sont obligatoires
En savoir plus sur le traitement des données