L'intégration de Monaco sur la liste noire : pour qui sonne le glas fiscal ?

Vous voulez plus d’informations ?
Contactez nous sans engagement au +33(0)1 56 79 11 00

Nos attachés d'information sont à votre écoute et vous expliqueront notre fonctionnement.
Rencontrons-nous !
Nous sommes présents au 90 avenue Niel,
62 & 69 rue Ampère, 75017 Paris.

Jean Martin
Ancien Inspecteur des Impôts
Nous bénéficions de l'expertise de notre of counsel, Jean Martin, ancien Inspecteur des Impôts.
Sommaire
Vous avez des liens avec Monaco, qu'ils soient personnels ou professionnels ? Vous suivez avec attention les évolutions fiscales internationales ? Si c'est le cas, une récente annonce a sûrement retenu votre attention : la Commission européenne a inscrit Monaco sur la "liste noire", ou liste des pays présentant un risque élevé de BC/FT pour le système financier européen, pour sa lutte insuffisante contre "le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme". Sauf à ce que le Parlement européen ou le Conseil de l'UE en décide autrement dans un délai de deux mois, cette décision a pourtant une résonance particulière pour quiconque entretient des liens économiques ou patrimoniaux avec la Principauté. Face à cette nouvelle classification, l'anticipation et la régularisation deviennent les maîtres mots.
Comprendre les différentes "listes noires" : une distinction cruciale
Il est essentiel de comprendre qu'il existe plusieurs types de "listes noires", chacune ayant un objectif et des conséquences bien spécifiques. La confusion entre ces listes peut entraîner des malentendus importants.
La lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme
Lorsque nous parlons de l'intégration de Monaco sur liste noire, nous faisons référence à celle du Groupe d'action financière (GAFI) et à celle de la Commission européenne des pays présentant un risque élevé de blanchiment de capitaux (LBC) et de financement du terrorisme (FT) pour le système financier européen.
Le GAFI est un organisme intergouvernemental qui œuvre à l'échelle mondiale pour prévenir et réprimer le BC/FT.
L'objectif du GAFI n'est pas directement la lutte contre la fraude ou l'évasion fiscales, mais plutôt de s'assurer que les pays disposent de cadres juridiques et institutionnels robustes pour tracer et sanctionner les flux financiers illicites et ainsi lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
Malgré les progrès réalisés sur certains aspects de la lutte contre le terrorisme, Monaco avait été placé, en juin 2024 sur la liste grise de surveillance renforcée par le GAFI qui avait identifié plusieurs domaines dans lesquels Monaco devait réaliser des progrès, notamment en matière de blanchiment d'argent et de fraude fiscale commis à l'étranger, de saisie des avoirs criminels à l'étranger, de niveau des ressources attribuées aux magistrats, de l'application de sanctions efficaces et dissuasives, et de l'accroissement de la saisie des biens soupçonnés de provenir d'activités criminelles.
Le 10 juin 2025, la Commission européenne a confirmé que Monaco figurait désormais sur la liste noire, sous réserve que le Parlement européen ou le Conseil de l'UE en décident autrement dans un délai de deux mois.
L'inscription sur la liste noire signale des défaillances graves et expose les pays à une surveillance renforcée de la part de la communauté internationale.
Les conséquences d'une telle inscription sont considérables et entraînent une dégradation de l'image de la juridiction sur la scène internationale. Cette perception négative la transforme en un environnement à haut risque pour toutes les transactions financières, ce qui incite les institutions financières mondiales à renforcer leurs mesures de diligence raisonnable. Cela se manifeste par des contrôles plus rigoureux, des délais de traitement allongés et une augmentation des frais, tout en imposant des obligations de vigilance accrues à leurs partenaires, qu'il s'agisse de banques, d'assurances ou de cabinets d'avocats. De surcroît, les places financières, les marchés de l'art et les commissaires-priseurs sont soumis à une surveillance intensifiée, et les acteurs de la principauté font face à une surveillance renforcée des institutions financières internationales lors de leurs transactions. Ces répercussions se traduisent par des difficultés croissantes pour les entités et les individus de la Principauté à accéder aux marchés financiers et aux services bancaires mondiaux, ce qui peut entraîner une diminution notable des investissements directs étrangers, les investisseurs se montrant naturellement réticents à s'engager dans un environnement sous surveillance.
A ce jour, la Corée du Nord, l’Iran et le Myanmar sont des juridictions à haut risque faisant l’objet d’un appel à action. Ces pays figurent sur la liste noire du GAFI.
Les juridictions listées par la Commission européenne comme présentant un risque élevé de BC/FT pour le système financier européen sont quant à elles beaucoup plus nombreuses. Il s’agit par exemple de l’Afghanistan, du Cameroun, de la Corée du Nord, de l’Iran, etc. Depuis le 10 juin 2025, font notamment désormais partie de cette liste Monaco, l’Algérie, le Liban.
La lutte contre la fraude et l'évasion fiscales
Parallèlement, la Commission Européenne établit également sa propre liste des juridictions fiscales non coopératives en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Cette liste vise spécifiquement les pays qui ne respectent pas les normes de bonne gouvernance fiscale de l'UE en matière de transparence, d'échange d'informations et d'absence de régimes fiscaux préférentiels dommageables. L'objectif est ici de lutter directement contre l'évasion et la fraude fiscales.
Monaco n’y figure pas actuellement, ce qui reflète les efforts de la Principauté pour se conformer aux standards internationaux de transparence fiscale, notamment à travers des accords d’échange automatique d’informations.
Les conséquences d'une inscription sur cette liste incluent :
- Des restrictions d'accès aux fonds européens.
- Des mesures défensives des États membres. En effet, les pays de l'UE peuvent appliquer des dispositions fiscales plus strictes aux transactions et aux entités liées aux juridictions listées. Ainsi, le BOFIP (Bulletin officiel des Finances Publiques), prévoit, par exemple :
- Que les dépenses découlant des activités commerciales liées aux paradis fiscaux ne sont plus déductibles à des fins fiscales,
- Une retenue à la source des bénéfices versés de 75% au lieu de 30% (Flat Tax).
Face à la vigilance accrue des administrations fiscales et à l'échange automatique d'informations, la dissimulation d'avoirs à l'étranger est devenue une stratégie obsolète et extrêmement risquée. La régularisation spontanée est aujourd'hui la seule voie sensée pour sécuriser votre situation.
La régularisation consiste à déclarer volontairement aux autorités fiscales les avoirs et revenus non déclarés détenus à l'étranger. L'objectif est de se mettre en conformité avec la loi, d'échapper aux sanctions pénales et d'atténuer les sanctions fiscales qui seraient appliquées en cas de découverte fortuite par l'administration. En effet, la démarche proactive est généralement mieux considérée que la découverte forcée.
Si les dispositifs de régularisation "clés en main" comme la Cellule de régularisation (STDR) ont pris fin, la possibilité de régulariser spontanément sa situation fiscale demeure. Les contribuables peuvent toujours déposer des déclarations rectificatives, que ce soit pour l'impôt sur le revenu, l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) ou d'autres impôts. Il est possible de corriger les déclarations passées pour inclure les avoirs et revenus non déclarés. Ils peuvent aussi prendre contact avec l'administration fiscale. Une démarche volontaire, souvent initiée par un avocat, peut permettre d'engager un dialogue avec le fisc pour régulariser la situation de manière encadrée.
Il est important de préciser que les conséquences de l'évasion fiscale sont lourdes et multiformes. En cas de détection, vous risquez une majoration des droits d'impôts non acquittés, des amendes significatives, pouvant aller jusqu'à 80% des sommes dissimulées pour manœuvres frauduleuses, et des intérêts de retard. Ce sont les sanctions fiscales.
L'évasion fiscale peut également constituer un délit de fraude fiscale, passible de peines d'emprisonnement et d'amendes pénales substantielles. Si les fonds proviennent d'activités illicites ou si le montage vise à masquer l'origine des fonds, un délit de blanchiment d'argent peut s'ajouter, entraînant des peines encore plus sévères. Ce sont les sanctions pénales.
Sachez à titre d’exemple que le Panama, les Iles Vierges américaines ou encore la Russie figurent sur la liste des pays qui ne coopèrent pas avec l'UE ou n'ont pas pleinement mis en œuvre leurs engagements.
Inscription de Monaco sur la liste des juridictions à haut risque BC-FT : quelles conséquences ?
Historiquement perçue comme un havre de stabilité et de discrétion, Monaco est aujourd'hui sous les feux des projecteurs, confrontée aux exigences croissantes de transparence fiscale. L’inscription de Monaco sur la liste noire des juridictions sous surveillance du GAFI a des répercussions à plusieurs niveaux. Mais au-delà des gros titres, que signifie concrètement cette évolution ?
Pour la Principauté de Monaco
L'impact sur l'économie monégasque pourrait être significatif, se manifestant d'abord par une baisse de l'attractivité économique. L’image d'un centre financier stable et sûr pourrait être compromise, risquant de décourager l'arrivée de nouveaux investisseurs, entrepreneurs et résidents fortunés. Cette situation entraînerait un frein à la croissance des secteurs clés de l'économie monégasque, notamment la banque, la finance et l'immobilier, qui seraient directement impactés par une diminution des flux financiers et des investissements.
Parallèlement, une augmentation des contraintes administratives pourrait peser sur les institutions financières monégasques, qui pourraient être amenées à se conformer à des exigences de diligence et de conformité beaucoup plus strictes de la part de leurs correspondants bancaires internationaux, alourdissant ainsi leurs opérations et leurs coûts.
Enfin, Monaco pourrait faire face à d'importantes pressions politiques et réformes, devant s'engager dans un processus intensif de réformes pour démontrer au GAFI et à la Commission européenne sa capacité à combler les lacunes identifiées, ce qui représenterait un défi politique et financier majeur.
Pour vous, particuliers et entreprises
Les conséquences directes pour vous pourraient se traduire par des difficultés et des délais pour vos transactions. Vous pourriez en effet rencontrer des obstacles majeurs pour effectuer des virements internationaux depuis ou vers Monaco. Les banques étrangères pourraient refuser des transactions ou exiger des justificatifs de plus en plus détaillés et intrusifs, allongeant considérablement les délais.
De plus, une augmentation des coûts bancaires pourrait survenir, les frais liés à vos opérations transfrontalières pouvant grimper en raison des diligences supplémentaires exigées par les régulateurs et les banques.
La complexification de la gestion de patrimoine pourrait également devenir une réalité : gérer vos avoirs à Monaco, qu'il s'agisse d'ouvrir des comptes, de réaliser des investissements ou de financer des projets, pourrait devenir plus complexe, plus lent et potentiellement plus coûteux.
Enfin, une attention fiscale accrue pourrait être observée. Bien que l'inscription GAFI ne soit pas directement liée à la fraude fiscale, elle pourrait indirectement attirer l'attention des autorités fiscales de votre pays de résidence sur les avoirs que vous détenez à Monaco. Cela pourrait inciter certains pays à intensifier leurs demandes d'informations, même pour des avoirs parfaitement légaux. Cela rappelle l'importance cruciale d'une parfaite conformité fiscale de vos avoirs, où qu'ils soient détenus.
Anticiper et sécuriser vos avoirs : notre rôle à vos côtés
L'intégration de Monaco sur la liste noire des juridictions à haut risque est un signal fort, mais il est important de savoir que la Principauté a déjà engagé des réformes pour renforcer son dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT), afin de répondre aux attentes du GAFI et de la Commission européenne. Des efforts considérables sont actuellement déployés pour limiter la durée et l'impact de cette inscription.
Vous vous demandez s'il faut craindre un risque accru de contrôle fiscal pour les résidents fiscaux français ou les entités ayant des liens avec Monaco ? La réponse est claire : oui, la vigilance des administrations fiscales ne fera que s'accentuer face à cette nouvelle donne.
Pour vous, cette situation doit être l'occasion de revoir attentivement votre situation patrimoniale et vos flux financiers. Nous vous recommandons vivement d'adopter une démarche proactive et de prendre les devants.
Assurez-vous que la provenance et la destination de vos fonds sont toujours traçables et respectent toutes les réglementations en vigueur, sans la moindre ambiguïté.
Attendez-vous à ce que les processus bancaires exigent désormais davantage de documentation et de justificatifs pour toute transaction. Une préparation minutieuse en amont vous fera gagner un temps précieux et vous évitera bien des tracas.
C'est précisément là que le rôle de l'avocat fiscaliste devient primordial. Notre cabinet est à votre entière disposition pour évaluer les répercussions potentielles sur votre situation spécifique. Un avocat fiscaliste, expert en la matière, vous guidera dans l'analyse de vos avoirs, la préparation minutieuse de vos dossiers, et la régularisation de toute situation complexe. Nous vous accompagnerons personnellement dans toutes les démarches nécessaires pour sécuriser vos opérations et garantir la conformité de vos avoirs, que ce soit à Monaco ou ailleurs.
Le paysage fiscal international continuera d'évoluer vers toujours plus de transparence. La conformité n'est donc plus une simple option, mais une obligation impérative.