Qui du franchisé ou du franchiseur est propriétaire de la clientèle ?

Qui du franchisé ou du franchiseur est propriétaire de la clientèle ?

Franchisé, franchiseur, bailleur vous souhaitez mettre fin au contrat de franchise ou au bail avant son terme. Quelles sont alors les conséquences pour la clientèle ? Le franchisé peut-il revendiquer des droits sur la clientèle ? Avocats PICOVSCHI fait le point avec vous sur l’état du droit et de la jurisprudence en la matière.

« S’il faut toujours dire la vérité à la clientèle, il n’y a pas de commerce possible »

Marcel PAGNOL

Le franchisé a une clientèle propre par rapport au bailleur : décision de la Cour de cassation de 2002

Un franchisé Conforama faisait l’objet d’un refus de nouvellement de son bail et demandait à ce titre une indemnité d’éviction. Le bailleur soutenait que le franchisé ne pouvait y prétendre, car il ne détenait pas de fonds de commerce dans la mesure où la clientèle ne lui appartenait pas. Depuis une jurisprudence de 1937 de la Cour de cassation, la clientèle était considérée comme l’un des critères déterminant le fonds de commerce.

Par un arrêt Trévisan du 27 mars 2002, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a dû se pencher sur la question de la qualité de propriétaire ou non d’un fonds de commerce par le franchisé, portant le débat par conséquent sur la propriété ou non d’une clientèle.

La Haute Cour a ainsi considéré que « d’une part que si une clientèle est, au plan national, attachée à la notoriété de la marque du franchiseur, la clientèle locale n’existe que par le fait des moyens mis en œuvre par le franchisé, parmi lesquels les éléments corporels du fonds de commerce, matériel et stock et l’élément incorporel que constitue le bail, que cette clientèle fait elle-même partie du fonds de commerce du franchisé puisque, même si celui-ci n’est pas le propriétaire de la marque et de l’enseigne mises à sa disposition pendant l’exécution du contrat de franchise, elle est créée par son activité, avec des moyens que, contractant à titre personnel avec ses fournisseurs ou prêteurs de deniers, il met en œuvre à ses risques et périls. »

Il ressort de cet arrêt qu’en matière de franchise, il existe une double clientèle : celle attachée au plan national à la notoriété de la marque du franchiseur, et celle au plan local attachée au franchisé en raison des moyens mis en œuvre par ce dernier.

Il convient de ne pas généraliser cet arrêt à l’ensemble des situations auxquelles peuvent être confrontés les franchisés. En l’espèce, la Cour de cassation, se prononçant sur le terrain des baux commerciaux, a souhaité laisser la possibilité aux franchisés d’obtenir une indemnité d’éviction en cas de non-renouvellement de leur bail. Rappelons qu’en vertu de l’article L145-14 du Code de commerce, le bailleur est en droit de refuser le renouvellement du bail commercial, mais il devra alors s’acquitter d’une indemnité d’éviction auprès du locataire s’il n’invoque aucun des motifs prévus par la loi pour justifier une telle décision.

Précisons également qu’aujourd’hui, notamment depuis l’arrêt Chattawak rendu par la Cour d’appel de Paris le 9 avril 2009, les tribunaux ne considèrent plus la clientèle comme étant un critère essentiel à la détermination du fonds de commerce, mais seulement comme l’une de ses composantes qui peut même ne pas exister.

Les droits du franchiseur sur la clientèle

La jurisprudence Trévisan n’a pas été suivie dans tous les domaines de la jurisprudence. Ainsi par un arrêt du 2 octobre 2007 SA Andey c/ SAS Vanica, la Cour d’appel administrative de Chambéry a jugé que le franchiseur qui avait mis en place un système de fidélisation de la clientèle auprès de son enseigne via des cartes de fidélité, était le propriétaire de la clientèle, car elle lui était attachée.

Un tel raisonnement résultait du fait que le franchisé n’était pas propriétaire du fichier de fidélisation des clients, car il était précisé au sein même du contrat de franchise que ce programme était développé par le franchiseur et que le franchisé n’était qu’un collecteur. En outre, c’était le franchiseur qui supportait la charge financière des avantages procurés aux clients grâce à la carte fidélité.

Par ailleurs dans le secteur de la concession automobile, la chambre commerciale de la Cour de cassation par un arrêt du 6 mai 2008 n’a pas étendu la jurisprudence Trévisan à un concessionnaire Peugeot arguant du fait que « la clientèle constituée par le concessionnaire pour l’exploitation de la marque est attachée à cette marque ».

Il ressort de la jurisprudence que selon les secteurs, les juges n’apprécient pas la propriété de la clientèle de la même manière. En effet, en matière de fast-food, d’hôtellerie, de concession automobile, d’instituts de beauté, la grande distribution…etc. la clientèle est plus attachée à l’enseigne du franchiseur qu’au franchisé, ce qui réduit quelque peu la possibilité de revendiquer un droit sur la clientèle par le franchisé. Cependant dans d’autres secteurs tels que les salons de coiffure, il semblerait que la clientèle soit plus attachée à la personne du franchisé qu’à l’enseigne du franchiseur, ce qui rend plus légitime la captation de la clientèle par le franchisé et non le franchiseur.

Que vous soyez franchisé, franchiseur, bailleur, en pareille situation, il convient de consulter un avocat en droit de la franchise afin de vous assurer la meilleure défense qui soit et faire respecter vos droits. Avocats PICOVSCHI se tient à votre disposition afin de vous faire partager son expérience et son savoir-faire.

Votre avis nous intéresse

* Ces champs sont obligatoires
En savoir plus sur le traitement des données