Le délit de recel vu par un avocat en droit pénal

Le délit de recel vu par un avocat en droit pénal

Sommaire

Le recel est un délit prévu et réprimé par le Code pénal. Il consiste, pour une personne qui a acquis un bien en le sachant volé ou obtenu par d'autres infractions, à le cacher ou à le dissimuler afin que son auteur ne puisse être identifié ou poursuivi. Avocats Picovschi vous en dit plus sur le délit de recel et ses sanctions.

Définition du recel

Il est fait interdiction « de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit », de même que « le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit. »

Quelles sanctions en cas de recel ?

Cette infraction est passible d’une peine pouvant aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 375.000 € d’amende, la peine privative de liberté pouvant être portée à 10 ans et l’amende à 750.000 € d’amende lorsque le recel « est commis de façon habituelle, (…) en utilisant les facilités que procure l’exercice d’une activité professionnelle [ou] en bande organisée. »

Cette infraction fait l’objet de nombreux engagements de poursuites, de manières isolées ou en association avec des poursuites engagées sur le terrain d’un crime ou d’un délit principal, dont le recel serait l’accessoire.

Pour autant, les termes du Code pénal doivent être appréciés de manière stricte de sorte que de nombreuses voies de droit peuvent être utilement empruntées pour échapper à une condamnation lorsque les éléments constitutifs de l’infraction ne sont pas réunis.

Ainsi, outre les éléments de recherche communs à toute défense pénale, touchant à la prescription de l’action publique ou au respect des droits de la défense, le recel recouvre certaines spécificités qui, si elles sont suffisamment étudiées par la défense, peuvent permettre d’aboutir à une ordonnance de non-lieu au stade d’une information judiciaire ou une relaxe au stade du jugement.

Comment prouver un recel ?

La première de ces spécificités touche à l’obligation faite au Ministère Public de rapporter la preuve d’une infraction originelle, antérieure au délit de recel.

En effet, le recel consiste, en substance, à détenir ou user du produit d’un crime ou d’un délit. L’exigence d’une infraction antérieure dont serait issu le produit détenu ou usé par l’auteur du recel constitue donc un prérequis indispensable à la validité des poursuites.

Attention, toutefois, à ne pas prêter à cette condition un effet plus important que celui qu’il détient réellement.

Si la démonstration d’une infraction préalable est nécessaire à l’engagement de poursuites contre un mis en cause (Cass. Crim., 17 mai 1989), cela ne signifie pas pour autant que l’accusation soit tenue de qualifier précisément ce délit originel (Cass. Crim., 19 juin 2001, n° 99-85.188) ni d’en avoir identifié les coupables (Cass. Crim., 7 mai 1942), encore moins d’avoir obtenu leur condamnation (Cass. Crim., 4 janv. 1963).

Allant plus loin, il a même été jugé qu’un receleur pouvait valablement être condamné même si l’auteur de l’infraction principale a été relaxé (Cass. Crim., 9 fév. 1956) et même s’il est couvert par une immunité qui empêcherait de le poursuivre (Cass. Crim., 6 nov. 1936).

En définitive, la seule exigence qui vaille sur ce point consiste, pour le parquet, à établir de manière certaine la preuve de l’origine délictuelle ou criminelle du bien recelé.

Pour autant, cette preuve n’est pas toujours rapportée. Dans une telle hypothèse, un avocat pénaliste n’éprouverait aucune difficulté à obtenir la fin des poursuites engagées contre son client ou, si ces poursuites ont été menées jusqu’au renvoi devant un tribunal correctionnel, à obtenir de celui-ci qu’il prononce la relaxe du mis en cause. 

Une exception mérite, ici, d’être mise en exergue. Elle concerne les droits de la défense.

En effet, si la production de pièces de procédure ou d’écrits provenant d’une information judiciaire couverte par le secret de l’instruction implique, en principe, que son producteur soit poursuivi pour recel de violation du secret de l’instruction, de telles poursuites ne peuvent être engagées lorsque cette production est employée pour faire usage des droits de la défense dans un procès pénal.

Il a ainsi été jugé par la Cour de cassation que le juge saisi de poursuites en diffamation contre un journalise devait rechercher si la production en justice de pièces normalement couvertes par le secret de l’instruction n’a pas été rendue nécessaire par l’exercice des droits de la défense qui bénéficient, rappelons-le, d’un principe à valeur constitutionnelle (Cass. Crim., 11 juin 0002, n° 01.85.237).

Une autre spécificité importante en matière de recel touche à la nature de la chose recelée.

Le produit du recel

La loi évoque successivement « la chose » provenant d’un crime ou d’un délit, puis « le produit » d’un crime ou d’un délit.

En ce sens, il pourrait être considéré que le recel puisse s’appliquer à tout ce qui découle d’une infraction préalable.

Néanmoins, la jurisprudence est venue préciser le périmètre de cette infraction et en a exclu le recel d’information, issue de la violation d’un secret professionnel ou d’un délit d’initié, par exemple (Cass. Crim., 3 avril 1995, n° 93-81.569) et le recel de biens abandonnés, quand bien même le mis en cause croyait détenir le produit d’un vol et ne pouvait donc douter de son origine délictuelle (CA Paris, 17 mars 2001).

À l’inverse, il est indifférent que le produit de l’infraction initiale ait été remis au receleur par l’auteur de ladite infraction ou par un intermédiaire, et ce même si ce dernier était de bonne foi et ignorait son origine délictuelle (Cass. Crim., 3 avr. 1936).

Enfin, spécificité essentielle du délit de recel, l’engagement de poursuites, ou du moins le prononcé de culpabilité implique que la preuve de l’intention délictuelle du prévenu soit rapportée.

L’élément intentionnel de l’infraction

La détention du produit d’une infraction ne peut être qualifiée de recel que si le détenteur en a pris possession « en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit ».

Le recel constitue donc une infraction intentionnelle de sorte qu’il ne peut y avoir de recel sans intention de le commettre.

Le plus souvent, cette intention coupable est déduite de la simple prise de possession du bien par un mis en cause qui en connaissait l’origine frauduleuse, sans qu’il soit nécessaire qu’il connaisse les détails de l’infraction originelle.

En d’autres termes, la preuve de l’intention coupable du mis en cause se traduit, concrètement, par la preuve de la connaissance de l’origine délictuelle de la chose recelée (Cass. Crim., 30 oct. 1978 et 7 nov. 1990).

Point important en termes de prévention, cette connaissance s’apprécie au moment de la prise de possession de la chose. Le mis en cause qui est entré en voie de possession de bonne foi, mais qui aurait eu, par la suite, connaissance de l’origine frauduleuse de la chose recelée ne peut, en principe, être condamnée sur le terrain de l’article 321-1 du Code pénal.

C’est en ce sens que s’est plusieurs fois prononcée la Cour de cassation, qu’il s’agisse d’un acquéreur de véhicule qui a pris connaissance de son origine frauduleuse après son acquisition (Cass. Crim., 24 nov. 1977) ou du créancier qui a reçu de bonne foi, le versement de sommes en paiement d’une dette et qui apprend, par la suite, que les fonds remis provenaient d’une escroquerie (Cass. Crim., 24 janv. 1978).

Ces deux conditions (intention frauduleuse et connaissance de l’origine frauduleuse) sont tellement peu dissociées que la preuve de l’origine délictuelle de la chose recelée suffit systématiquement à établir l’élément moral de l’infraction, sans que le parquet n’ait à justifier de l’intention réelle du mis en cause de détenir, transmettre ou jouir du produit du crime ou du délit (Crim., 27 oct. 1997, n° 96-83.698).

En dépit du nombre de poursuites engagées sur le fondement de l’article 321-1 du Code pénal, il n’en demeure pas moins que l’infraction de recel est enfermée dans un carcan très spécifique qui le distingue des autres infractions prévues et réprimées par le législateur.

Confier une mission d’assistance et de représentation à un avocat pénaliste à même d’assurer une défense digne de ce nom s’avère donc être une exigence de prudence dont un mis en cause devrait faire preuve.

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