La question prioritaire de constitutionnalité

La question prioritaire de constitutionnalité

| Mis à jour le 08/12/2021 | Publié le

SOMMAIRE

La loi constitutionnelle du 28 juillet 2008 portant modernisation de la République a introduit l’article 61-1 de la Constitution. Cette innovation juridique tend à révolutionner tant la protection des droits et libertés fondamentales des justiciables que la pratique judiciaire. Avocats Picovschi vous en apprend plus sur cette procédure.

Qu’est-ce que la question prioritaire de constitutionnalité ?

Il s’agit d’une voie de recours extraordinaire par laquelle le Conseil constitutionnel est saisi afin de se prononcer sur la conformité d’un texte juridique au bloc de constitutionnalité composé de la Constitution de 1958, de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, du Préambule de la Constitution de 1946 ainsi que de la Charte de l’environnement de 2004.

L’article 61-1 de la Constitution encadre cette procédure, en prévoyant qu’elle ne peut être mise en place que par le biais des tribunaux devant lesquels une procédure est engagée.

La question prioritaire de constitutionnalité soulevée devant les juges du fond

La loi du 10 décembre 2009 est venue apporter des précisions sur la mise en œuvre de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

Plusieurs conditions doivent être réunies pour qu’une QPC puisse être soulevée devant les juges du fond. Tout d’abord, une disposition législative doit porter atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution. Ensuite, la loi en cause doit évidemment avoir un lien avec l’affaire pendante devant le juge du fond, et elle ne doit pas avoir déjà fait l’objet d’une QPC ou d’un contrôle antérieur à la demande. Par ailleurs, la question ne doit pas être dépourvue de caractère sérieux.

Cette dernière condition est appréciée par les juges du fond. Ils doivent alors rendre une décision motivée sur la pertinence ou non de transmettre la QPC à la Cour de cassation (hypothèse du civil ou du pénal) ou au Conseil d’État si l’on est devant le juge administratif.

Si les juges du fond reconnaissent l’utilité de transmettre la QPC, ils doivent alors surseoir à statuer, ce qui signifie que l’affaire sera suspendue le temps que la Haute juridiction décide à son tour de l’utilité de transmettre la QPC au Conseil constitutionnel et que ce dernier se prononce.

La Cour de cassation saisie d’une QPC par les juges du fond doit vérifier certaines conditions avant de décider de la transmettre ou non au Conseil constitutionnel. Tout d’abord, elle s’assure que les conditions examinées par les juges du fond sont bien remplies, et que la question est bien nouvelle et sérieuse.

Elle dispose d’un délai de 3 mois pour se prononcer sur la transmission ou non de la question au Conseil constitutionnel. En l’absence de réponse dans ce délai, la question est transmise directement.

Si la Cour de cassation décide de transmettre la QPC au Conseil constitutionnel, elle y joint les mémoires ou conclusions transmises par les parties, et en informe les parties et les juges du fond dans les 8 jours de son prononcé.

Si la Cour de cassation décide de ne pas transmettre la QPC, elle fait part de sa décision au Conseil constitutionnel, aux parties et aux juges du fond.

La question prioritaire de constitutionnalité examinée par le Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel recevant une QPC en informe immédiatement le Président de la République, le Premier ministre et les Présidents des deux assemblées. Chacun de ces protagonistes peut faire part de ses remarques au Conseil constitutionnel.

Les parties peuvent également présenter contradictoirement leurs positions au cours d’une audience publique, sauf exception.

Le Conseil constitutionnel dispose lui aussi d’un délai de 3 mois pour prendre une décision motivée, la notifier aux parties, et la communiquer à la Cour de cassation et aux juges du fond concernés.

Le Conseil constitutionnel communique également la décision au Président de la République, au Premier ministre et aux Présidents des deux assemblées, et s’assure de sa publication au Journal officiel de la République française (JORF).

Si la disposition est jugée conforme à la Constitution, elle est maintenue dans nos normes juridiques.

Néanmoins, si la disposition est jugée non conforme, le Conseil constitutionnel peut décider de son abrogation, soit immédiate ou à effet différé, pour permettre au législateur de mettre en place de nouvelles normes juridiques et ainsi éviter le vide juridique sur des sujets qui peuvent être sensibles.

À noter qu’une décision du Conseil constitutionnel n’est pas susceptible d’appel, elle est définitive.

Quelques exemples de questions prioritaires de constitutionnalité

En 2020, 740 décisions avaient été rendues par le Conseil constitutionnel depuis la mise en place de la QPC.

Ces QPC concernent de nombreux sujets, voici un aperçu de quelques décisions constitutionnelles.

Par décision du 11 juin 2010, le Conseil constitutionnel a censuré l’article 7 du Code électoral concernant la radiation automatique des listes électorales pour les personnes dépositaires de l’autorité publique après qu’elles aient été condamnées pour certaines infractions. En effet, pour les sages, l’automatisation de la sanction est contraire au principe d’individualisation des peines fondée sur l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme de 1789 (Décision n° 2010-6/7 QPC du 11 juin 2010).

En outre, le Conseil constitutionnel s’est prononcé en droit pénal dans plusieurs décisions comme par exemple, le 30 juillet 2010, concernant les principaux articles régissant la garde à vue, qu’elle a déclaré contraire à la Constitution, mais avec un effet différé de 11 mois, permettant ainsi au législateur de réformer le droit pénal en instaurant notamment le droit à l’assistance d’un avocat dès le début de la procédure (Décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010).

De même, par une décision du 2 octobre 2020, le Conseil constitutionnel a laissé 5 mois au pouvoir législatif pour reformuler la loi afin que d’améliorer les conditions de détention, notamment en permettant la saisine du juge de conditions contraires à la dignité de la personne humaine aux personnes en détention provisoire.

La QPC offre donc de nouveaux moyens aux avocats de défendre les intérêts de leurs clients. Soumises à un contrôle strict, seuls les plus déterminés, pointilleux et efficaces des avocats sauront former des QPC recevables. Outre la défense de son client, c’est la défense de tous les citoyens pouvant se retrouver dans la même situation qui est engagée. En tant que professionnel du droit, Avocats Picovschi se tient au courant des dernières actualités juridiques et vous accompagne dans vos différentes problématiques.

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