Droit de la distribution : comment Internet bouleverse les règles

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SOMMAIRE

Le développement d’Internet remet en cause la distribution traditionnelle. Comme il n'est plus possible de s'affranchir d’Internet aujourd'hui, les contrats de franchise et de distribution sélective doivent s'y adapter. Avocats Picovschi, compétent en droit de la distribution depuis plus de 30 ans, revient sur le contenu de la législation applicable en la matière.

La vente en ligne des distributeurs sous conditions

En matière de distribution, il convient de distinguer deux types de distributeurs : les distributeurs non-agréés et les distributeurs agréés par le promoteur de réseau.

S'agissant des distributeurs non agrées, l’Autorité de la concurrence considère que ces derniers n’ont pas le droit de vendre en ligne s'ils sont des « pure players », c'est-à-dire une entreprise de e-commerce ne disposant pas de point de vente physique (décision du 24 juillet 2006).

Dans un arrêt du 16 octobre 2007, la Cour d’appel a confirmé cette décision. En l’espèce, une entreprise spécialisée dans la vente sur Internet de produits d'horlogerie s’était vu refuser un agrément au sein d’un réseau de distribution sélective par un fabricant de montres au motif qu’elle était un « pure player ». Le Conseil de la Concurrence, saisi en première instance, avait donné raison au fabricant de montres à condition qu’il prévoie l'exclusion des vendeurs « exclusivement Internet » dans le contrat-cadre de distribution de base. La Cour d'appel de Paris ne faisait que confirmer la décision du Conseil de la Concurrence. Il est alors précisé que les promoteurs de réseau de distribution ne pourront pas interdire la vente en ligne à leurs distributeurs si ces derniers disposent d'un point de vente physique (Cons. conc., déc. n° 06-D-24, 24 juillet 2006 ; CA Paris, 1ère ch, 16 octobre 2007).

Concernant les distributeurs agréés par le promoteur de réseau, un arrêt rendu le 2 décembre 1999 par la Cour d'appel de Versailles a réaffirmé le principe posé par les lignes directrices communautaires : on ne peut a priori pas interdire la vente sur Internet à un distributeur. En l'espèce toutefois, la vente en ligne avait été refusée au distributeur agrée car le site Internet n'était pas conforme aux critères qualitatifs exigés par le promoteur du réseau dans le contrat dans la mesure où la vente de cosmétique exige un contact indispensable avec la clientèle pour des raisons de sécurité et de santé.

Il n’en demeure pas moins que la donne a évolué au fil du temps et un arrêt de la CJUE de décembre 2017 (affaire C-230/16) est venu introduire de nouvelles exigences. C’est ainsi que la Cour d’appel de Paris, par une décision du 28 février 2018 (RG n°16/02263) a repris celle de la Cour de Justice en consacrant le principe selon lequel la tête d’un réseau de distribution sélective peut valablement interdire à ses distributeurs de distribuer ses produits via des plateformes tierces. En l’espèce, le système de distribution sélective était justifié par la catégorie des produits vendus, estampillés comme étant de « luxe ».

La Cour d’appel a donc considéré que les fournisseurs de produits de luxe ne sauraient interdire de manière absolue aux distributeurs agréés de vendre sur internet lesdits produits sélectifs, tout en leur laissant le loisir d’interdire leur distribution sur des plateformes tierces et non agréées tant que la prohibition demeure totalement proportionnelle en son principe et limite à l’objectif de préservation de l’image de luxe.

Ainsi, le Conseil de la concurrence a autorisé les promoteurs de réseau ou les franchiseurs à imposer des modalités de présentation et d'exploitation en ligne qui respectent son image de marque. Un promoteur de réseau peut donc imposer une charte graphique. Il peut également exiger de son distributeur la mise en place d'une assistance téléphonique adéquate, la détention de stock en continu pour satisfaire les besoins des clients ou encore un service après-vente dans un local physique.

En revanche, le Conseil de la Concurrence a exigé que ces contraintes soient « proportionnelles à l'objectif visé et comparables avec celles qui s'appliquent dans le point de vente physique des distributeurs agréés ».

Le promoteur de réseau peut vendre en ligne

Le Conseil de la concurrence a indiqué à de nombreuses reprises que le promoteur de réseau pouvait librement commercialiser les produits sur Internet auprès de son client.

Or, dans un arrêt du 14 mars 2006, la Cour de cassation a eu l'occasion de confirmer la position du Conseil de la concurrence (Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 14 mars 2006, 03-14.316). En l'espèce, il s'agissait d'un contrat de franchise et le franchiseur avait ouvert un site Internet sous l'enseigne correspondant à la marque concédée en droit exclusif au franchisé. Ce dernier se prévalait de l'article 7-3 de son contrat de franchise aux termes duquel le franchiseur s'était engagé « […] pendant la durée du contrat, à ne pas autoriser l'ouverture d'autres points de vente […] dans le territoire d'exclusivité en dehors de celui du franchisé ». Mais la Cour de cassation a considéré que « la création d'un site Internet n'est pas assimilable à l'implantation d'un point de vente dans le secteur protégé » et pose ainsi le principe qu'un franchiseur ou tout autre promoteur de réseau peut faire de la vente en ligne.

En revanche, comme l'énonce le Règlement communautaire n°2790/99, le site du promoteur de réseau ne doit pas porter préjudice à ses distributeurs. Dès lors, cela signifie que le promoteur de réseau ne doit pas pratiquer de vente active à destination des clients finaux des distributeurs bénéficiant d'une exclusivité de fourniture ou d'une exclusivité territoriale. Si le promoteur de réseau réalise une vente passive, il aura alors le droit de créer un site Internet.

Les lignes directrices du 22 décembre 1999 ont donné les définitions de la vente active. Ainsi, la vente active consiste en la mise en œuvre d'un site Internet « clairement conçu clairement conçu de manière à atteindre en premier lieu des clients se trouvant à l'intérieur d'un territoire ou d'un groupe de clientèle exclusivement concédé à un autre distributeur, par exemple en utilisant des bandeaux publicitaires ou des liens dans les pages de fournisseur visant exclusivement la clientèle concédée ».

A contrario, il y a vente passive « si un client visite sur Internet le site d'un distributeur et prend contact et si ce contact débouche sur une vente ».

Par conséquent, toute vente sur Internet effectuée par le promoteur de réseau devra être considérée comme étant une vente passive, sauf à démontrer que celui-ci a réalisé une vente active. 

En conclusion, dans le cadre d'un contrat de franchise ou de distribution sélective, les distributeurs non agrées ne peuvent vendre en ligne le produit du promoteur de réseau. Les promoteurs de réseau ou franchiseurs peuvent eux-mêmes vendre en ligne à condition que cela soit de la vente passive. Enfin, s'agissant des distributeurs agréés, la nouvelle tendance jurisprudentielle est de leur permettre de vendre par Internet, avec la possibilité offerte au franchiseur d'imposer des normes de qualité à son franchisé.

Les contrats de franchise et de distribution sélective doivent donc prendre en considération toutes ces spécificités. Et il est vivement recommandé d'ajouter aux anciens contrats des avenants prenant en compte la vente en ligne, sous peine de rencontrer de mauvaises surprises. 

Un avocat compétent saura vous aider dans la renégociation des contrats de franchise afin de prévoir ou d'exclure ce mode de vente.

Avocats Picovschi, compétent en droit des affaires et des nouvelles technologies, vous accompagne également dans le cadre des litiges qui opposent distributeurs et promoteur de réseau dans la perspective de préserver les intérêts légitimes de leurs affaires.

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