Rupture brutale des relations commerciales établies

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En l'état du droit actuel, il faut avoir respecté un préavis suffisamment long avant de mettre un terme à une relation commerciale établie. En effet, il est stipulé dans l'article L. 442-1, II du Code de commerce que le fait de « rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels » engage la responsabilité de l'auteur de la rupture. Ce dernier est alors obligé de réparer le préjudice causé. Avocats Picovschi vous éclaire sur la rupture des relations commerciales établies.

Qu'est-ce qu'une relation commerciale établie ?

Tout entrepreneur exerçant son activité en entreprise individuelle ou en société doit créer et maintenir des relations commerciales solides.

Les relations commerciales se rapportent à l'ensemble des rapports que vous pouvez développer avec les partenaires économiques de votre entreprise (client, fournisseur, distributeur…). Que signifie concrètement relation commerciale établie ?

Définition de la relation commerciale établie

La jurisprudence de la Cour de cassation offre un vaste spectre à la notion de relations commerciales établies. En effet, une relation commerciale établie peut être contractuelle ou précontractuelle. Elle concerne non seulement les acteurs possédant un statut de commerçant au sens du Code de commerce, mais aussi les associations et les artisans.

Les seuls critères que la Cour de cassation a exigés relèvent du caractère suivi de la relation commerciale qui doit être significative, régulière et stable. Une relation commerciale établie est donc un rapport solide (stable, suivie et habituelle) entre deux parties. Cela signifie que l'échange dure dans le temps, qu'il y ait ou pas un contrat entre les deux parties. Cette précision est cruciale, puisque même en l'absence de contrat avec votre prestataire ou fournisseur, le juge peut considérer qu'il s'agit d'une relation commerciale et alors lui appliquer la réglementation qui en découle.

Par exemple, supposons que vous gérez une brasserie artisanale. Pour votre distribution, vous achetez des bouteilles en verre tous les mois à un fournisseur, et ce, depuis des années. Il s'agit d'une relation commerciale établie. Selon la loi, elle est dite « établie » lorsque le rapport en question est stable, suivi et continu dans le temps. Ce statut peut avoir plusieurs impacts, notamment en cas de rupture brutale de la relation commerciale.

Les différentes relations commerciales

Pendant l'exercice de votre activité, vous pouvez être amené à rencontrer différents contrats. Il s'agit notamment des suivants :

  • le contrat de vente,
  • le contrat de prestation de services,
  • le contrat de distribution.

Le contrat de vente organise une transaction entre un fournisseur et un client tandis que le contrat de prestation de services organise la réalisation d'un service par un prestataire de service. Quant au contrat de distribution, il organise l'attribution par un commerçant, des produits achetés à un fournisseur. Ces contrats peuvent être affiliés à une transaction commerciale courte et éphémère, mais également à une relation commerciale établie.

Conditions de la rupture brutale des relations commerciales établies

La rupture brutale des relations commerciales établies s'effectue sans préavis.

Le préavis devra prendre en compte la durée de la relation commerciale et respecter la durée minimale de préavis déterminée, sur la base des usages du commerce, par des accords interprofessionnels.

En cas de rupture brutale des relations commerciales établies, la responsabilité de l'auteur de la rupture brutale peut être engagée si les trois critères suivants sont constatés : relation à caractère établi, rupture totale ou partielle, durée de préavis appliquée insuffisante.

La relation à caractère établi

Le caractère établi des relations commerciales est constitué quand les relations sont régulières, significatives et stables (Cass. com. 15-09-2009, n° 08-19200). Le juge va déterminer si, au regard de la continuité des relations entre les deux parties, la victime de la rupture brutale a pu raisonnablement considérer que la relation commerciale allait continuer avec la même stabilité (Cass. com. 16-12-2008, n° 07-15589).

La rupture totale ou partielle

La rupture brutale peut être caractérisée dans plusieurs cas, même si elle n'a pas été matérialisée par un courrier notifiant expressément la volonté de rupture. De plus, la modification désavantageuse des conditions de la relation commerciale pour l'une des parties, imposée unilatéralement par l'autre, peut être considérée comme une rupture totale brutale, lorsque cette modification est substantielle.

La durée du préavis

L'auteur de la rupture brutale des relations commerciales doit respecter un délai de préavis suffisamment long pour donner à son partenaire commercial le temps de se réorganiser. Le délai de préavis à respecter doit tenir compte des critères légaux, notamment la longueur de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou en référence aux accords interprofessionnels.

La durée du préavis à respecter doit également tenir compte de l'appréciation retenue par la jurisprudence, notamment :

  • des circonstances lors de la notification de la rupture,
  • du volume d'affaires réalisé,
  • du secteur d'activité concerné,
  • de l'état de dépendance économique de la victime,
  • de l'exclusivité de la relation commerciale établie.

Les tendances qui suivent peuvent se dégager dans la jurisprudence.

  • Pour des relations commerciales d'une durée inférieure à 10 ans, le préavis sera de 6 à 12 mois.
  • Les relations commerciales dont la durée est comprise entre 10 et 20 ans sont « protégées » d'un préavis moyen de 12 mois.
  • Si la relation commerciale date de plus de 20 ans, le préavis peut être de 12 à 18 mois.

Une fois de plus, il n'y a pas de durée minimale obligatoire clairement établie par les textes et chaque affaire doit être traitée au cas par cas.

Si les partenaires n'avaient pas fixé un délai de préavis, le juge peut néanmoins estimer que le délai de préavis est insuffisant et considérer que la rupture des relations commerciales est brutale. En mars 2018 (Cass. com., 21-03-2018, n° 16-17146), les juges ont ainsi fixé une durée de préavis de 2 ans dans le cas d'une relation commerciale datant de 50 ans entre un fabricant et un distributeur, auteur de la rupture des relations commerciales. Les juges se sont basés notamment sur la proportion que représentait l'activité confiée au fabricant dans son activité globale.

L'article L. 442-1, II du Code de commerce (nouvelle rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019) a mis en place un principe d'exonération de responsabilité si un préavis de 18 mois n'a pas été respecté, et ce, quelle que soit la durée de la relation commerciale. Ce délai au titre du préavis représente par conséquent une protection pour l'auteur de la rupture.

Cela devient particulièrement intéressant quand il s'agit des relations commerciales très longues pour lesquelles le juge pouvait retenir un délai de préavis supérieur à 18 mois. Exceptionnellement, des relations commerciales établies peuvent toutefois être valablement rompues sans préavis lors d'inexécution (assez grave) par l'autre partie ou en cas de force majeure.

Rupture des relations commerciales établies : les sanctions

La victime de la rupture brutale d'une relation commerciale peut assigner en référé l'auteur de la rupture sous astreinte afin d'obtenir la continuation de la relation. La victime peut aussi assigner au fond l'auteur de la rupture pour se voir allouer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Indemnisation du caractère brutal de la rupture

Il y a seulement huit juridictions de premier degré qui peuvent traiter des contentieux de rupture brutale de relation commerciale établie. Il s'agit notamment des tribunaux de commerce de Marseille, Fort-de-France, Lyon, Bordeaux, Tourcoing, Nancy, Paris et Rennes. La Cour d'appel de Paris est l'unique juridiction d'appel des jugements rendus par ces juridictions spécialisées.

Le juge prend en compte les dommages résultant du caractère brutal de la rupture. L'indemnisation doit couvrir le préjudice direct, mais aussi tous les préjudices « subséquents » en rapport avec la rupture brutale. C'est donc uniquement le caractère brutal de la rupture qui est indemnisé, pas la rupture en elle-même. La rupture d'une relation commerciale n'étant pas interdite par la loi. Le préjudice indemnisable est déterminé en fonction de la durée du préavis jugé nécessaire. Le partenaire commercial évincé est supposé retrouver une solution qui équivaut à celle perdue au cours du délai de préavis estimé suffisant par le tribunal.

Paiement de dommages et intérêts

Pour évaluer les dommages et intérêts, les critères entrant en ligne de compte sont les suivants :

  • le manque à gagner au cours de la durée de préavis,
  • la perte de chance,
  • les frais engagés.

Très souvent, le préjudice découlant d'une rupture brutale de la relation commerciale établie doit être évalué sur la base de la marge brute escomptée au cours du délai de préavis que le cocontractant aurait dû respecter (Cour d'appel de Paris, 02-02-2017, n° 15/04850). Rappelons que la marge brute est définie comme « la différence entre le prix de vente d'un produit ou service et son coût de revient, c'est-à-dire le coût de production ou d'acquisition » (Cass. com, 23 janvier 2019, n° 17-26870).

Donc, l'indemnisation de ce préjudice équivaut au gain non réalisé lors du préavis qui aurait dû être accordé. Il est notamment question du montant qui replacerait la victime de la rupture dans la situation qu'elle aurait connu s'il n'y avait pas eu de rupture brutale. Dans le but d'évaluer le préjudice subi, la jurisprudence a aussi retenu la marge sur les coûts variables, déterminée en fonction du chiffre d'affaires dont la victime de la rupture brutale a été privée sous déduction des charges n'ayant pas été supportées en raison de la baisse d'activité résultant de la rupture (Cour d'appel de Paris, 17-01-2018, n° 15/17101).

En dehors du principal préjudice que représente le gain manqué, la partie victime de la rupture brutale peut éventuellement solliciter une indemnisation pour réparer des préjudices particuliers. Cela n'est possible que si ces préjudices découlent directement du caractère brutal de la rupture. Par exemple, certaines juridictions ont indemnisé le préjudice moral qui résulte de la rupture brutale en se basant notamment sur l'absence de loyauté et l'attitude vexatoire de l'auteur de la rupture.

Le préjudice indemnisable dépend donc fortement des spécificités de chaque espèce. En conséquence, il semble complexe d'évaluer à priori les chefs de préjudice qui seront systématiquement indemnisés, alors que d'autres seraient, tout aussi systématiquement rejetés. La partie victime de la rupture brutale des relations commerciales établies a enfin la possibilité d'engager une action en responsabilité dans un délai de cinq ans à compter de la rupture.

Engagez une action en justice avec un avocat en droit des affaires

Le domaine de la responsabilité pour rupture brutale et abusive des relations commerciales établies est particulièrement complexe. Cela se justifie par le fait qu'il est le fruit d'évolutions jurisprudentielles, et quelquefois législatives.

Les sanctions de la rupture brutale de la relation commerciale établie peuvent être lourdes. De ce fait, l'assistance d'un avocat en droit commercial est un atout important, que ce soit pour limiter la portée ou argumenter efficacement afin d'obtenir la meilleure réparation possible.

Si vous pensez avoir été victime d'une rupture brutale de relation commerciale établie, n'hésitez pas à faire appel à un avocat en droit commercial. Faites-vous accompagner par Avocats Picovschi pour agir contre l'auteur de la rupture et réclamer l'indemnisation des préjudices résultant du caractère brutal de la rupture. Nos avocats connaissent bien la matière et ses évolutions. A noter que la rupture commerciale ne s’entend pas forcément d’une rupture totale, une baisse des commandes pourrait également justifier une action.

L'avocat en droit des affaires est donc mieux placé pour vous aider à mettre en place une stratégie procédurale efficace. L'essentiel est d'avoir des preuves convaincantes que la rupture de la relation commerciale est brutale et abusive. Il faut aussi justifier les préjudices qui doivent être fondés sur des chiffres d'affaires clairs et incontestables. Les préjudices matériels et économiques sont évalués par référence à la notion de marge brute (Cass. Com., 23 janvier 2019, n° 17-26.870).

Dans ce cas encore, Avocats Picovschi vous accompagne pour chiffrer et affiner correctement vos préjudices. Compte tenu de la situation, un avocat en droit commercial pourra aussi envisager d'autres fondements à votre action et défendre au mieux vos intérêts en cas de litige. N'hésitez pas à faire appel à notre cabinet d'avocats, expert en droit des affaires, pour vous représenter.

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